Même si ses romans occupent le centre de son œuvre, Monique LaRue se consacre aussi, depuis de nombreuses années, à cet autre art de la prose qu’est l’essai, occasion pour elle de méditer sur son travail de romancière, de réfléchir sur le monde qui l’entoure, d’approfondir ses expériences de lectrice et ses découvertes de voyageuse, bref, de garder en éveil cette attention au monde et cette conscience critique qui, à ses yeux, sont indissociables de la pratique littéraire et en font tout le prix.
Écrits « de fil en aiguille » au cours des dix ou douze dernières années, les essais rassemblés ici composent le portrait d’une romancière profondément attachée à son art, aux grandes valeurs qui le définissent (les mots, la langue, la liberté, le privilège de la distance et du doute, la compassion), aux œuvres et aux auteurs qui l’illustrent de manière exemplaire, et aux défis inédits que lui pose le temps présent. Car ces textes sont aussi un tableau du monde où nous vivons et dans lequel chacun, à commencer par l’écrivain, doit trouver sa juste place et le moyen de demeurer humain, ne serait-ce qu’en refusant d’éluder les difficultés nouvelles qui se présentent à lui sous diverses formes, tantôt sociales ou politiques (la question de l’engagement de l’écrivain, la littérature dite migrante), tantôt culturelles (les transformations de l’enseignement, la marginalisation de la littérature), tantôt technologiques (l’informatique, le Web). Or, devant toutes ces situations, comme au milieu des pays étrangers qu’elle visite (Japon, Flandre, Égypte), Monique LaRue cherche constamment un regard et une pensée où se font équilibre l’accueil et la réserve, l’ouverture et la lucidité, la curiosité avide du navigateur et la sage prudence de l’arpenteur.
Ainsi, entre la romancière, qui invente des mondes fictifs pour saisir ce qui du monde réel ne se laisse saisir que par la fiction, et l’essayiste, qui réfléchit au monde réel pour en éprouver les résistances et le mystère, la collaboration est parfaite. C’est que toutes deux jouent du même instrument : cette prose déliée, rigoureuse et souple à la fois, saturée de pensée et de sensibilité, qui est la voix propre de Monique LaRue.