Gilles Marcotte est né en 1925 à Sherbrooke. Après des études secondaires au Séminaire de Sherbrooke, il a obtenu une maîtrise en littérature à l’Université de Montréal en 1951, et un doctorat à L’Université Laval de Québec en 1969.
Il a été journaliste au Devoir de 1948 à 1955, réalisateur à la télévision de Radio-Canada de 1955 à 1957, scénariste et directeur de la recherche pour la production française à l’Office national du film de 1957 à 1961, journaliste (membre du comité de rédaction) à La Presse de 1961 à 1966. De 1966 à 1995, il a enseigné au Département d’études françaises de l’Université de Montréal où il a été nommé professeur émérite en 1997.
Il a collaboré à de nombreuses revues et participé à des émissions de radio et de télévision. Il est chroniqueur littéraire au magazine L’actualité depuis de nombreuses années et titulaire de la chronique «L’amateur de musique» à la revue Liberté.
Il a donné des cours et des conférences en France, au Brésil, aux États-Unis et en Italie.
Il a reçu la médaille Lorne-Pierce de la Société royale du Canada (1991); la médaille de l’Académie canadienne-française (1974); le Laureatus alumnus du Séminaire de Sherbrooke (1975); le prix Marcel-Vincent de l’Association pour l’avancement des sciences (ACFAS) (1982); le prix du meilleur article de fond par l’Association des Éditeurs de revues culturelles (1988); le prix d’excellence de la Ville de Sherbrooke (1992) et un doctorat honoris causa de Guelph University (1993). Enfin, le Prix Athanase-David lui a été remis en 1997 pour l’ensemble de son œuvre.
Gilles Marcotte est décédé en 2015.
[…] Comment le définir autrement que par cette flamme pour les lettres, qu’il démontra toute sa vie comme journaliste, professeur,
écrivain bien sûr, comme critique aussi. Des piles de livres à feuilleter et à lire, des projets d’écriture plein la tête, Gilles
Marcotte baigne toujours dans la littérature. Et il en est fort aise.
et qui donnent lieu à des livres, raconte-t-il à propos de sa propre
écriture, très liée à celles des autres pour les idées soudainement
générées. On écrit à partir de la vie, des événements qui nous
touchent, mais on écrit aussi beaucoup à partir de ce qu’on lit. C’est
Malraux qui disait que la peinture ne s’apprend pas seulement dans la
nature, mais à partir des tableaux que l’on voit. C’est la même chose
pour les livres!»
[…]
D’abord initié au plaisir de la littérature par le biais des
études, où il découvre notamment les Sermons de Bossuet, une
rencontre qui le hante aujourd’hui encore, Gilles Marcotte poursuit sa
découverte de la littérature en goûtant au journalisme. C’est d’abord
à La Tribune de Sherbrooke qu’il fait un bref passage, >«des plus formateurs», et touche à plusieurs des cordes du
journalisme. Puis c’est au Devoir qu’il prête sa plume, entre
1948 et 1955, d’abord aux pages générales, jusqu’à ce qu’on lui
propose, contre toute attente, le secteur de la littérature.
«J’ai été très étonné mais le plus ravi des hommes! La littérature,
c’était une passion pour moi. Mais ça m’a demandé à l’époque
énormément de travail de rattrapage, parce que je n’avais pas lu les
grands classiques que tous mes collègues issus de Brébœuf
connaissaient déjà.»
Le «rattrapage» a porté fruit. […]
On aurait oublié que Gilles Marcotte est aussi romancier, s’il
n’avait eu la bonne idée de renouer avec le genre, plus de trente
après ses deux premières tentatives.
[…]
Le nouveau Marcotte est un Marcotte nouveau, tout entier œuvre
jubilatoire, et il faut savoir gré au célèbre critique de ne pas boudé
son plaisir. Nous ne bouderons pas le nôtre, nous baladant dans ce
polar qui n’en est pas un, dans cette histoire d’amour sans amants,
dans ce roman exotique qui n’en a que la toponymie et dans
ce thriller sans suspense qui ont ensemble un rythme
dément, qui nous emporte où? Au diable vauvert?
[…]
Quel roman simple et compliqué à la fois! Un homme a des missions à
accomplir ici ou là, dont nous ne savons pas grand chose, ni lui sans
doute. Missions «délicates, difficiles», et faisons confiance au
jugement du je narrateur, qui n’expliquera ni cette délicatesse ni
cette difficulté.
L’essentiel est ailleurs, il est grave et dérisoire, il s’obstine à
couiner au fond du cœur, comme un désir inassouvi ou peut-être
seulement un rêve de désir, car si son objet paraît rentrer un instant
dans la réalité, il est pourtant que leurre ou mirage, vous tendez la
main vers lui – mais c’est une femme! – et déjà il n’est plus là, le
désir retrouve sa densité, sa nudité entières de pur désir.
Chercher la femme, donc, n’est d’aucun secours. Reste la musique et
M. Marcotte est un fameux mélomane. De musique il discourt donc, mais
sans conséquences, parce que cet art est abstrait, parce que son
langage ne ressemble à aucun autre, parce qu’il ne sait titiller chez
les humains rien de ce qu’on appelle science ou connaissance, sur quoi
ils essaient de bâtir leurs pauvres certitudes, mais seulement le
magma où se fond la mémoire des sens. La musique ne sert à rien, cela
fait son prix, et le romancier en a les moyens.
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