La légende veut que Gould ait été un reclus souffrant d’instabilité émotive, surgi de nulle part, dont l’apparition sur la scène musicale aurait fait l’effet d’un coup de tonnerre. Le portrait nuancé qu’en trace Bazzana est tout autre, celui d’un être complexe qui, tout en étant un véritable excentrique et en faisant preuve de dons exceptionnels, était beaucoup plus qu’on ne l’a dit le produit de l’époque et du milieu qui l’avaient vu naître.

Bazzana fait le bilan des diverses influences qui se sont exercées sur Gould : celle – religieuse, sociale, culturelle – du Toronto de l’immédiat avant-guerre, celle de son enfance protégée, celle de son seul professeur officiel de piano, et celle des nouvelles institutions culturelles qui ont vu le jour au Canada au cours des années 50 et 60. L’auteur propose également de nouvelles perspectives sur la vie professionnelle de Gould : sa brève mais marquante carrière de concertiste, sa passion pour l’enregistrement et les médias électroniques, ses relations avec la CBC, la compagnie de disques Columbia et les facteurs de pianos Steinway & Sons.

L’auteur a puisé dans les souvenirs de nombreux proches de Gould, souvent interviewés ici pour la première fois, ainsi que dans les archives du musicien pour faire ressortir des aspects originaux du développement musical et intellectuel de Gould, de ses excentricités légendaires, de ses convictions et de ses valeurs, de sa vie sentimentale entourée de secret, de son hypocondrie et de son équilibre mental, de son sens de l’humour typiquement Canadian. Enfin, il analyse les défis qui se sont posés à Gould au cours de ses dernières années : problèmes de santé menaçant la motricité de ses mains, tensions familiales, nouvelles voies créatrices musique de film et direction d’orchestre –, et il fait enfin état du véritable culte posthume dont le pianiste est l’objet.