La lodyans est un art du récit bref, un art de la miniature. Si elle cultive l’ellipse et préfère l’oblique, elle n’en dit pas moins le réel mieux qu’on n’y arriverait en l’abordant de front. Georges Anglade se fait ici tireur de lodyans et transpose dans le champ de l’écriture cette pratique orale bien haïtienne, née dans un pays où on peut mourir d’avoir «trop parlé».
Les trente-quatre lodyans qui composent ce recueil peignent quelques-uns des innombrables visages d’Haïti et retracent un itinéraire qui va de l’enfance (Quina) jusqu’à l’exil (Nédgé), en passant par la dictature (Port-aux-Morts).
Chaque éclat de ces trois mosaïques est comme un trait dans une ligne pointillée. Il ne reste plus qu’à combler les «blancs» qui les séparent les uns des autres pour obtenir le dessin tout entier, qu’à explorer ces trous de la mémoire, où la couleur n’est jamais chose innocente, pour que tout un monde se mette à vivre sous nos yeux.