Né à Montréal le 22 avril 1942, André Major entreprend dès 1961 une double carrière d’écrivain et de chroniqueur littéraire, d’abord au Petit Journal, puis aux quotidiens La Presse et Le Devoir, s’intéressant autant à la littérature québécoise qu’à la littérature étrangère. Il publie deux recueils de poèmes au début des années 1960 : Le froid se meurt et Holocauste à 2 voix. En 1963, son engagement politique l’amène à participer à la fondation de la revue Parti pris à laquelle il collabore jusqu’au début de 1965. En 1964, avec Le Cabochon, il s’engage dans une œuvre romanesque dont les thèmes s’approfondiront dans Le Vent du diable, puis dans la trilogie romanesque intitulée Histoires de déserteurs, qui comprend L’Épouvantail, L’Épidémie et Les Rescapés, que couronne le prix du Gouverneur général en 1977. Le Théâtre populaire du Québec monte Une soirée en octobre en 1975. Auparavant, il a publié deux pièces radiophoniques, Le Désir et Le Perdant.
En 1977, avec Jacques Godbout et d’autres écrivains, il contribue à la création de l’Union des écrivains québécois. Auparavant, pour dénouer la crise financière et éditoriale que traversent les Éditions du Jour, il participe à la fondation des Quinze, coopérative d’édition gérée par des écrivains. De 1973 à 1998, il travaille comme réalisateur au service des émissions culturelles du réseau FM de Radio-Canada où il produit des émissions dramatiques, des documents et des magazines littéraires. Entretemps, il se consacre à la nouvelle (La Folle d’Elvis, L’Hiver au cœur), genre auquel il s’est adonné très tôt (La Chair de poule) et qu’il aide à imposer dans un milieu littéraire dont le roman et la poésie sont les pôles d’attraction. Il a animé divers ateliers d’écriture à l’UQÀM, à l’Université d’Ottawa, à l’Université McGill et au Camp littéraire Félix, en plus d’avoir été écrivain en résidence à l’UQÀM, à l’Université de Montréal et au Camp littéraire Félix. Il a également dirigé des collections chez Leméac (Indépendances et L’Écritoire) et fait partie de la Commission consultative du Conseil des arts du Canada entre 1977 et 1980.
Après avoir été lauréat du prix Canada/Communauté française de Belgique en 1991 et du prix Athanase-David en 1992, il publie un roman, La Vie provisoire, en 1995. Puis, en 2001, paraît Le Sourire d’Anton ou l’adieu au roman, le premier volume de ses carnets que couronne le prix de la revue Études françaises. En 2007, il a publié ses carnets des années 1993-1994 sous le titre de L’Esprit vagabond, retenu en finale aux prix du Gouverneur général/section essais. Tout en poursuivant son travail critique dans des revues comme L’Atelier du roman et L’Inconvénient, il consigne dans ses carnets ce qui est la matière de sa réflexion. Il a obtenu en 2011 une résidence littéraire à Lisbonne pour achever le troisième volume de ses carnets, Prendre le large. Depuis lors, ont paru le roman À quoi ça rime ? (2013), ainsi que sa correspondance avec Pierre Vadeboncœur, Nous retrouver à mi-chemin (2016), et L’Œil du hibou (2017). Il obtient en 2016 la Bourse de carrière du Conseil des arts et des lettres du Québec. À l’automne 2020, paraît, toujours dans la collection Papiers collés, le cinquième volume de ses carnets, Les Pieds sur terre.
Depuis la mort de Gabrielle Roy, il est membre du conseil d’administration du Fonds Gabrielle Roy dont il est le vice-président.
Presse
À propos de L’Esprit vagabond
On a le plaisir rare de fréquenter un esprit sensible doublé d’un libre penseur épris de lucidité.
Paul Jacques, Le Clap
Nous oublions parfois que certains écrivains sortent des grandes avenues romanesques pour s’aventurer ailleurs. Les derniers «carnets» d’André Major, publiés chez Boréal sous le très beau titre L’Esprit vagabond, nous invitent à faire le saut, à choisir autre chose…un parcours plus intimiste assurément, au ton parfois poétique, parfois cynique, mais toujours juste d’un écrivain qui, jour après jour, transmet dans l’écriture se sensibilité au monde. Des enjeux sociopolitiques de l’époque à la beauté de la nature, ce chemin suit chronologiquement les premiers carnets de Major, publiés en 2001, sous le titre Le Sourire d’Anton ou L’Adieu au roman. Parce que l’Esprit vagabond propose une écriture libre et franche, nous nous sentons interpellés à notre tour dans notre quotidien, enthousiastes de partager tant, et si simplement.
Claudiane Laroche, Le libraire
La Marche
Dans ce très beau livre d’André Major, la nature nous est donnée à travers cet «esprit vagabond» qui n’en finit plus d’arpenter les sentiers longeant la rivière, ceinturant le lac, rejoignant le torrent. L’émerveillement et l’éblouissement du promeneur ou du flâneur (quoiqu’on parle davantage d’un flâneur urbain) n’en finissent plus de solliciter la complicité du lecteur ravi de découvrir au fil de ces promenades tous ces arbres, chênes, bouleaux, pins, hêtres, qui nous ressemblent, tous ces noms d’herbes et de fleurs qui bordent la route, tous ces rongeurs qui attendent l’homme qui marche, tout un spectacle ininterrompu de bruits, d’odeurs et de couleurs. De découvertes en plaisirs, le narrateur engage une conversation avec la flore qui l’entoure et le saisit tout comme l’image que l’on cherche et que l’on trouve. Au détour, des choses vivantes qui assaillent le visiteur de la forêt ; ce dernier songe à ses mots et à l’écriture de son roman, au nombre de pages composées la veille ou le matin avant de sortir, un, quatre ou cinq feuillets qui s’accumulent sur la table de travail.
Le vagabondage dans la nature n’a d’égal ici que l’«errance» scripturaire, pour reprendre le terme de l’écrivain. L’«esprit vagabond» suggère également la plume vagabonde, celle qui bouge au dehors et en dedans et court sur la feuille blanche. Que l’écriture soit libérée de la contrainte demeure toutefois une illusion, car l’écrivain semble toujours pris dans le piège d’une histoire à raconter, de personnages à cerner, d’une page à terminer. Au détour de ces sorties, des points de repère ou des pôles semblent guider l’homme : le chalet où l’on retourne sans cesse, le torrent qui murmure et accompagne la présence du rêve, enfin le feu allumé pour se débarrasser du bois mort et la trace ou la piste qui conduit toujours au récit et à la langue. La nature encense le personnage solitaire aux prises avec sa mémoire comme l’écrivain du carnet. On ne peut lire L’esprit vagabond sans conjuguer l’univers des mots avec celui des saisons et celui de la marche journalière dans un environnement familier.
Claudine Potvin, Lettres québécoises